Gérald Karsenti – Directeur Général de SAP France.
Ses discours sont emprunts d’optimisme. Il faut dire que ce dirigeant pose tout de go qu’« il n’existe pas de leader pessimiste ». Dans cet article, il partage avec nous sa vision de l’entreprise. Management, sens, leadership, formation, quels sont les facteurs clefs de mutation des entreprises ? Retours factuels d’un dirigeant pas comme les autres.
Gérald Karsenti, vous évoquez régulièrement le leader de demain. Qu’est ce qu’un leader demain ?
Pour Sigmund Freud : le leader dominant est le leader narcissique. Il a beaucoup de charisme et de persévérance, une capacité à entrainer les équipes mais il peut vite dévier. C’est un leader brillant qui peut vite sombrer dans l’excès (argent, sexe, …). Les leaders d’après-guerre étaient principalement des leaders narcissiques, également obsessionnels et érotiques.
Le leader de demain est un leader qui doit œuvrer pour l’entreprise. Il doit être plus ouvert aux autres, moins centré sur lui-même, il doit faire preuve de plus d’humilité. Il doit s’agir de personnalités tournées vers la réussite collective.
Le but étant de faire passer le collectif avant l’individu. L’enjeu est également de savoir créer une équipe, d’avoir les bonnes personnes aux bons postes.
Nous avons tendance à nous répliquer. Il est plus rassurant d’être entouré de personnes qui nous ressemblent. Mais le leader doit créer une équipe avec des profils différents. Le collaboratif me semble essentiel!
Est-ce que les grandes écoles nous emmènent sur ce chemin de collaboration et d’humilité ?
Les écoles ne forment pas de bons ou de mauvais leaders. J’interviens à HEC depuis 15 et je vois de plus en plus de remise en cause de la part des grandes écoles.
Le problème, en France (ou en Europe) est que la formation nous donne une sorte de passeport pour la vie mais cela ne fait pas notre métier. Ce qui fait notre vie professionnelle, c’est l’exploitation des différentes formes d’intelligences.
Les entreprises recherchent des intelligences analytiques, elles se calquent sur le modèle européen. Elles optimisent le recrutement sur le critère de l’intelligence logico-mathématique. Cela vient de l’après-guerre : avant la guerre, les leaders étaient des littéraires, après l’effondrement économique, les ingénieurs ont pris le pouvoir. Les mathématiques deviennent le critère de sélection.
Désormais on va passer à d’autres formes intelligences. Le QI va bien sûr être toujours important mais il n’est plus le seul. Les nouvelles intelligences de demain sont émotionnelles et relationnelles. Le but est d’être capable de créer un réseau. Les entreprises doivent diversifier le profil de leurs leaders.
Comment accompagner les collaborateurs ?
Nous accompagnons les jeunes par du coaching : quelqu’un en dehors de l’entreprise, donc neutre, qui va l’aider et à qui il va pouvoir se confier. On définit une cible, un objectif et une date limite. Manager, c’est d’accepter de régler des problèmes, c’est une vraie responsabilité.
Un bon manager est un manager qui aime profondément les gens. Et un excellent manager est exigeant et fait progresser ses collaborateurs avec bienveillance.
Il est à la fois un guide et un coach.
Feriez-vous un parallèle entre optimisme et management ?
L’optimisme est une caractéristique, une attitude, un comportement. C’est une façon d’anticiper et de contourner les murs. Le pessimiste, lui, ne voit que le mur. Il n’existe pas de leader pessimiste. On ne peut inspirer personne en étant pessimiste.