On ne compte plus le nombre d’articles qui ont été publiés sur le métier de Chief Happiness Officer. Complètement moqué par certains, véritable révélation pour d’autres, le job de CHO a fait couler beaucoup d’encre ces dernières années. Notre équipe, fondatrice du Club des CHO en 2017 et formatrice sur le sujet a accompagné l’évolution du métier en France. Nous répondons aux principaux clichés du métier.
CLICHÉ 1 : le CHO, un job de nana ?
Penser un monde de l’entreprise plus « sain » n’est nullement réservé à la gente féminine. Posséder un chromosome Y n’est, a priori pas antinomique avec chercher l’épanouissement des collaborateurs. Pourtant, c’est effectivement VRAI.
La thématique a été portée par une majorité de femmes. Ce qui n’est pas vraiment surprenant. Si vous analysez les métiers émergents (outre ceux « tech »), c’est souvent le cas. Le développement durable comptait à ses débuts plus de femmes que d’hommes. Il faut se risquer à sortir du moule de la « carrière » classique par conviction. Cela se rééquilibre ensuite.
CLICHÉ 2 : le CHO, un métier de jeune dans les start-up !
Complètement faux ! Et il s’agit là probablement de la pire ineptie sur le sujet. A plusieurs titres.
- Si le métier de CHO (nommé ainsi) est né chez google, des entreprises françaises comme Boiron ont une fonction similaire depuis plus longtemps que les années de vie de google.
- Vous croyez sérieusement que la majorité des start-ups ont l’argent pour payer un « vrai » CHO temps plein quand elles courent après le cash ?
- Effectivement, il y a quelques start-ups qui ont un CHO et ce sont elles que vous voyez à la télé et dans les médias. La raison ? Il est plus facile pour un grand média d’aller filmer chez eux que dans un grand groupe… Allez obtenir une accréditation pour filmer dans une tour du CAC40 à la défense !
CLICHÉ 3 : le CHO, le tapis qui recouvre le cadavre
Parfois vrai, parfois faux.
On va être honnête avec vous. Certaines entreprises ont embauché un CHO pour « avoir la paix » : « on a embauché quelqu’un pour ça, maintenant, arrêtez de vous plaindre ». Ces CHOi démissionnent relativement rapidement ensuite (on réalisera bientôt un article sur le sujet).
Ceci étant dit, clairement, il y a de la souffrance dans bon nombres d’entreprises. Les crises sociétales successives n’aidant en rien au bien-être des collaborateurs.
Il est important de ne pas confondre CHO et baguette magique du bonheur au travail, telle la caricature véhiculée sur le sujet. Un CHO ne rendra pas les 250 000 collaborateurs d’une entreprise heureux et ce n’est pas ce qu’on attend de lui, heureusement !
Il suffit d’un chef tyrannique pour qu’un équipe entière vive un enfer au quotidien.
Le CHO dans une entreprise ne doit pas venir nier la souffrance des collaborateurs et il faut accompagner sa prise de poste. Il part du constat de la réalité à un instant T et tente d’améliorer l’existant.
En réalité, il est courageux d’oser créer un poste de CHO : pour la direction, c’est se mouiller. Nous le voyons au quotidien : cela libérer la parole des salariés et questionne le système existant.
CLICHÉ 4 : le CHO, un animateur baby-foot ?
Ca fait cher l’animateur… Si quelqu’un fait passer ce message, c’est qu’il n’a aucune connaissance du terrain car c’est complétement FAUX.
Encore une fois, cette illusion est véhiculée par certain médias : il est plus facile de filmer la mise en place d’un cours de yoga ou d’un tournoi de babyfoot que la réflexion autour de l’accompagnement des managers vers de nouvelles pratiques managériales ! Et parler de la complexité du métier dans une reportage d’une minute est tout simplement impossible…
Précisons que le CHO n’a pas de moyenne d’âge 25 ans mais plutôt 40/45, a généralement managé des équipes avant, est a un poste bien plus stratégique que le comptage de points du tournoi de baby !
CLICHÉ 5 : le CHO, ce n’est pas ce que les RH devraient faire ?
VRAI et FAUX. Nous avons souvent entendu « le CHO, c’est le bon volet des DRH » et beaucoup ont du mal à positionner le CHO dans l’entreprise.
Commençons par un fait : au fil des années, nous avons rencontré bien des RH incroyables souhaitant redonner au métier ses lettres de noblesse et redevenir plus Humaine que Ressources. Nous sommes d’ailleurs intervenus dans des dizaines d’entreprises à leur demande. Et nous ne pouvons que témoigner de l’engagement de certains RH avec qui nous avons travaillé main dans la main.
Mais le Chief Happiness Officer n’est pas qu’une fonction RH.
Dans certaines entreprise, cette mission est portée par les RH, mais la fonction est encore protéiforme et vient parlier, dans d’autres entreprises, les déficiences : manque de temps des RH, déficit de confiance, non envie de s’investir dans le sujet…
CLICHÉ 5 : le CHO, un métier de « djeuns » qui n’ont pas compris la complexité du monde du travail
FAUX.
« Moi, monsieur, j’ai managé pendant 20 ans ! » « Et moi, monsieur, 15 ans que je suis DRH ». Une discussion sur LinkedIn hier prêtait à sourire : tout le monde y allait de son commentaire donneur de leçon à un « jeune » qui évoquait le sujet du bien-être au travail.
Bien sûr, l’expérience compte et comme nous l’évoquions plus haut, les CHO ne sont, globalement, pas des « jeunes ». Mais, il nous parait important de rappeler à chacun de faire preuve d’humilité. Une génération nouvelle arrive sur le marché et elle cherche un meilleur équilibre vie pro / vie perso. C’est avec eux que l’entreprise de demain se construit.
Nous avons rencontré, au sein du club, des membres issus des Facilities. A la base responsables de l’espace, ils ont eu à cœur de le penser POUR les salariés, de fil en aiguille leur périmètre s’est élargi. De même nous avons travaillé avec des collaborateurs qui s’occupaient de la transformation digitale de leur entreprise. « On vient vous voir car on se rend compte des impact majeurs sur le bien-être des collaborateurs que personne ne mesurent chez nous ! ».
CLICHÉ 6 : le CHO, un métier de stagiaire
Parfois VRAI, mais…
Quand on cherche une offre d’emploi de CHO, les postes à pourvoir semblent en majorité être des stages dans les start-ups. De même sur LinkedIn, on trouve peu de CHO qui semblent avoir du galon. D’où le raccourci.
L’erreur est de penser que les « Chief Happiness Officer » portent ce titre de CHO, ce qui n’est PLUS DU TOUT le cas : la dénomination ayant essayé tellement de critiques en France. En anglais le mot « happiness » n’a pas la même connotation qu’en France où quand on parle de bonheur, on y voit tout de suite une notion philosophique (à juste titre). D’autant que le mot de « Chief » n’est pas approprié.
Conséquence : en France, on marche sur la pointe des pieds pour employer le mot. C’est tendre le bâton pour se faire battre et être certain d’être harcelé de messages sur LinkedIn (surtout de solutions QVT).
De fait, les CHO choisissent d’autres dénominations ! Dans l’absolu, peu importe.
La quasi intégralité des groupes du CAC40 travaillent avec nous et ont, au sein de leurs équipes, des collaborateurs qui s’engagent pour essayer d’améliorer les choses en interne. Bizarrement, vous n’avez pas vu les offres passer ? Normal : les postes sont souvent pourvus en interne…
CLICHÉ 7 : le CHO, un métier éphémère
Dans l’idéal VRAI, dans les faits, le CHO a encore de belles heures devant lui.
Notre équipe répondait encore cet été 2022 à une étude européenne sur le sujet. Et force est de constater qu’il reste bien du chemin à parcourir avant la démocratisation du bien-être au travail. Mais si nous nous concentrons sur le positif : au moins, on en a fini avec le buzz autour du sujet. Et finalement, ceux qui en parlent le plus sont souvent ceux qui critiquent !
Notre conviction depuis 2017 reste la même : le sujet du bien-être au travail est central. Il s’agit d’un élément de performance pour l’entreprise tout autant que d’un besoin sociétal.
Pour être tout à fait honnête, nous non plus n’aimons pas la dénomination de CHO dont nous nous faisons pourtant l’échos. Elle nous paraît avoir le mérite d’être compréhensible de tous.
Aujourd’hui encore, il faut encore un référent sur le sujet pour la simple et bonne raison que si personne n’en est garant, le bien-être est très souvent mis de côté au profit des seuls KPI financiers. Ce garant existe parfois depuis longtemps au sein d’un service QVT, au sein des RH et même de la direction et nul besoin d’un CHO. Notre rêve serait le même que pour le développement durable : il faudrait que le sujet du bien-être semble évident à tout le monde et qu’il n’y avait plus besoin de CHO ou équivalent.
POUR RESUMER
Encore en 2022, de nombreuses entreprises créent des poste de CHO (ou assimilé) pour lancer une impulsion en interne. L’objectif est souvent d’initier une démarche et de montrer qu’on prend en compte le sujet en y dédiant un »pilote du projet ».
Notre équipe ne cherche nullement à militer pour le métier de CHO ! Il nous semble simplement important de rétablir quelques éléments de contexte et de rappeler à tous le besoin d’améliorer les conditions de travail. Le CHO ne fera rien tout seul, il travaillera avec les préventeurs, avec les RH, avec les collaborateurs et avec l’ensemble des parties-prenantes de l’entreprise.
Pour répondre à de nombreuses questions : notre formation d’une journée a pour objectif de présenter le métier et l’ensemble des outils à la disposition du CHO. Beaucoup de nos formés ne portent d’ailleurs pas la caquette de Chief Happiness Officer ! Et la formation s’adressent à tous ceux qui se questionnent sur le sujet.