Reverto est une start-up engagée qui a reçu le prix de l’innovation Preventica. Elle propose une solution en réalité virtuelle permettant de développer l’empathie afin de lutter contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes en entreprise. Rencontre avec Guillaume Clere, fondateur de Reverto.
Bonjour Guillaume, pouvez-vous vous présenter et nous dire comment vous en êtes arrivé à créer Reverto ?
Je suis journaliste reporter d’images. Je viens du magazine et du documentaire. Mon métier c’est de raconter des histoires en images et de porter des sujets de société. J’ai découvert le format de la vidéo 360 degrés qui permettait de gagner la bataille de l’attention. On est abreuvé d’images ; on est tout le temps sollicité par les mails, les réseaux sociaux… De nos jours, il est très difficile de capter l’attention des gens.
A 360 degrés, on est complètement plongé dans l’histoire et on oublie le reste. Il n’y a que ça durant 5 à 10 minutes. Un autre avantage : c’est un moyen de faire partie de l’histoire. Il n’y a plus de distance entre nous et l’écran. Des mécanismes d’identification, d’empathie et de sympathie se mettent en place. Cela peut aller assez loin dans l’expérience.
Parallèlement, il y a eu l’affaire #MeToo. Je suis un homme mais je suis entourée de femmes. J’ai des sœurs, j’ai une maman… Je me suis mis à la place des femmes. La réalité virtuelle permettait de changer de regard pendant quelques minutes et de se mettre « à la place de » pour avoir des déclics.
Les entreprises nous ont contactés car il s’agit d’un sujet qui les intéresse dans le cadre de la lutte contre le sexisme et la prévention des risques psycho-sociaux.
Pouvez-vous nous présenter votre solution en réalité virtuelle ?
On a une solution complète en réalité virtuelle de sensibilisation et de prévention contre le sexisme ordinaire en entreprise.
Le film s’appelle « La traque ». On incarne une victime, une cible, une femme, qui va tomber enceinte et il va se passer des choses. L’expérience dure 7 minutes. Elle s’inscrit dans notre vécu émotionnel.
Puis on a un module interactif qui permet de faire intervenir un expert sur les situations vécues. Il donne des clés et des conseils sur comment réagir dans ces situations. Il fait réfléchir sur la nature des phénomènes observés dans le film (interpellations familières, stéréotypes de compétences, ce que dit la loi, ce qu’est la discrimination fondée sur le sexe…).
Il y a aussi un quizz anonyme pour recueillir le ressenti des participants et vérifier que les points clés ont été intégrés.
Cette solution de 15 minutes au total est proposée sur licence de manière autonome. Elle peut s’insérer aussi dans une formation ou lors d’une journée de sensibilisation.
Plutôt que d’expliquer les choses, on les vit et on les ressent. C’est une solution de prévention car la prochaine fois qu’on va se confronter à cette situation, le vécu émotionnel va remonter. On va se souvenir de ce qu’on a vécu et que ce n’était pas agréable. Donc on va se mettre à la place de l’autre et se dire : « si ce n’était pas agréable pour moi, ce ne va pas être agréable pour l’autre. »
Quand c’est bien réalisé, le cerveau le met dans la case « souvenir » comme si cela avait été réellement vécu, cela permet de mieux comprendre ce que les autres vivent.
Quels sont les effets que vous avez pu observer jusqu’ici sur les participants ?
Grâce à ce vécu qui refait surface, les gens vont se mettre à comparer les ressentis des autres avec ce qu’ils ont expérimenté que ce soit en tant qu’auteur ou bien comme cible ou comme témoin.
Il est très important d’ouvrir le dialogue sur la manière dont on vit les choses pour qu’il y ait une prise de conscience et qu’on évite de systématiser.
Avez-vous d’autres projets de réalité virtuelle en cours ?
Le cœur de notre ligne éditoriale c’est le vivre ensemble et la lutte contre les risques psychosociaux. On souhaite aborder le harcèlement moral, les discriminations, la diversité et plus largement l’empathie managériale…
Nous sommes en train de faire de la recherche avec des laboratoires, des docteurs en psychologie pour mesurer l’impact de nos contenus en réalité virtuelle et pour être très précis dans ses mécanismes. En tout cas, pour l’instant ce qu’on mesure c’est que l’impact émotionnel de ce format est extrêmement puissant.
La réalité virtuelle a de nombreuses applications. Il y a quelques années nous vous en parlions pour l’arrêt du tabac. Pour voir l’article, cliquez ici.