Lors d’un évènement de notre réseau organisé en partenariat avec Harmonie Mutuelle, nous avons eu la chance d’accueillir Matthieu Lassagne. Ingénieur et HEC de formation, Matthieu Lassagne est le fondateur d’un cabinet de coaching professionnel spécialisé pour les personnes douées, intuitives et multipotentialistes, Coaching & Douance. Voici les points clés de cette pause-café au cours de laquelle Matthieu nous invite à aborder le sujet des hauts potentiels en entreprise « comme une bulle pour nous inspirer ».
Quelques mots sur Matthieu Lassagne
Cet ingénieur de formation a d’abord passé une première partie de sa carrière dans le milieu de la finance car il souhaitait s’ouvrir à « un maximum de possibilités ». Tout en rappelant que chaque parcours est singulier, Matthieu Lassagne confie qu’il s’est longtemps interrogé sur le sens de son travail et c’est en découvrant sa propre douance qu’il a entamé un cheminement intérieur. Alors qu’il se sent « plafonné » dans sa carrière, il décide d’oser et d’aller vers une transformation personnelle et professionnelle qui lui permettrait de combiner sens et énergie vitale. Il s’est alors tourné vers le coaching professionnel de RH et de dirigeants qui, pour lui, « passionne les HP qui peuvent ainsi être acteurs de transformation et allier performance et humain. »
Hauts potentiels : quelques points de définition
Matthieu souligne qu’il est important de rappeler le cadre de référence lorsque l’on tente de définir les « hauts potentiels ».
Dans le champ de la psychologie, on estime que les HP concernent 2% de la population. Actuellement, l’outil qui permet d’évaluer la douance est la WAIS (QI supérieur à 130). Mais l’identification de cette caractéristique peut également se faire dans le cadre d’un entretien avec un psychologue certifié qui va pouvoir déterminer si dans notre fonctionnement, il y a une douance. Beaucoup de collaborateurs ou de dirigeants peuvent se retrouver, à la lecture d’articles, dans les définitions du HP, sans jamais être à proprement parler « évalués ». L’important reste d’être bien dans sa carrière et avec les autres.
Les HP se remettant souvent en question, les premiers concernés ont tendance à ne pas se reconnaître en tant que HP.
Dans certaines entreprises, le taux de HP peut aller jusqu’à 20% et l’entreprise peut passer à côté de la performance si elle refuse d’aborder le sujet.
« Faux-self » et parcours de vie d’un HP
Le « faux-self » est un concept au cœur du sujet des HP et concerne tout un chacun. Pour appréhender ce qu’est le « faux self », retraçons l’histoire de vie moyenne d’un HP. Dès les 1ères années de développement, il s’agit en général d’un enfant qui a une forte sensibilité et une capacité à voir les signaux faibles en captant les faiblesses des adultes. Il se sent tel un OVNI et se demande : « que puis-je faire pour créer une personnalité de façade qui me permette de donner le change avec les autres ? » C’est une histoire de survie. Cette adaptation va continuer avec la famille et au sein de l’école. Souvent, on constate une absence de « juste place » dans la famille qui se reflète plus tard dans la carrière. C’est ainsi que se crée le « faux self », au démarrage « pour faire plaisir » : c’est une personnalité de façade. Le HP est un « drogué du lien ». Ce qui compte pour lui est d’être aimé par ses parents et il va même adopter des croyances et des opinions appartenant à cette personnalité de façade. Sa carrière va se construire ainsi : ne pas trop se mettre en valeur, estimer que communiquer ou réussir ce serait dépasser ses frères ou sœurs…Les HP pensent d’abord à leur famille plutôt qu’à eux. A mi-carrière, ils sentent qu’ils ont enfin les moyens financiers et psychiques de devenir eux-mêmes. Ce sont souvent des personnes qui ne se sentent pas à la bonne place et leur pertinence en réunion peut parfois faire peur à leur N+1.
Ce faux-self est tellement lourd, qu’ils décident un jour de s’autoriser, d’oser, de se mettre en valeur et de se rapprocher d’une carrière qui les reconnecte à leur énergie vitale. Cela demande une forme de lâcher prise pour accepter que « la juste place » vienne à soi.
HP et tests
Parmi les 2% qui sont « testés », on peut se demander si nous ne sommes pas plus nombreux. Les tests sont parfois coûteux et le résultat peut être violent. Dans tous les cas, le résultat d’un test s’accompagne. Il y a de nombreux débats sur ce que signifie être HP.
Peut-être que la difficulté du HP à se définir reflète la difficulté du salarié à se définir.
Quant à la question de passer le test de la WAIS, Matthieu Lassagne pense qu’il faut voir cette décision comme une étape parmi d’autres de son développement personnel.
Par ailleurs, certaines personnes THQI (Très Haut Quotient Intellectuel) vont saboter le test de peur d’être détectées. De manière générale, les personnes HP détestent les cases alors qu’il faut parfois reconnaître la case pour s’en émanciper.
Jeux relationnels et carrière professionnelle
Les HP sont souvent dans des jeux relationnels inconscients dans leur carrière. Comment les dépasser ?
- Reconnaître qu’il nous arrive de postuler à un « poste moyen », en dessous de ses compétences et de ses ambitions.
- Être au clair avec sa stratégie de carrière au moment de l’embauche
- Pendant la prise de poste, clarifier les missions, les responsabilités de chacun, la manière de travailler des uns et des autres pour diminuer les risques de burn-out.
- Si un salarié se découvre HP en cours de route : poser une réunion avec son N+1 pour reconnaître qu’il y a coresponsabilité et que chacun est légitime dans sa position.
Le « fonctionnement » du HP en entreprise
Les HP fonctionnent beaucoup sur un mode intuitif, en allant directement vers la solution. Il y a une sorte de fulgurance intuitive, invisible dans les organisations. Ils disent souvent la vérité inconsciente que tout le monde sait mais que personne ne regarde en face. On les reconnaît par la pertinence de leurs pensées et leur rapidité à dépatouiller des solutions impossibles. Parfois, se mêlent aussi « hypersensibilité » et « hyperempathie ». Ces personnes posent un regard particulier sur l’univers et ont souvent de fortes questions existentielles en toile de fond : « pourquoi suis-je venu(e) sur terre ? » Ce qui n’est pas forcément religieux…Il y a chez eux une forte envie de réussir, davantage liée au fait d’avoir un impact que pour des raisons financières.
Cette question du sens a une place centrale dans l’entreprise. Se relier à la phénoménologie, à l’essentialisme est ce qui nous permet de nous relier à l’enjeu business de fond. Cette immense envie du HP à se sentir utile est hélas parfois rattrapée par le faux-self.
Qui consulter ?
Il y a souvent une confusion autour des HP, une notion qui peut être confondue avec le trouble bipolaire, la dépression…Pour Matthieu Lassagne, s’il y a souffrance, c’est d’abord un médecin, un psychiatre qu’il faut consulter. En parallèle, un coaching peut être complémentaire à une thérapie.
En ce sens, la Gestalt thérapie peut être une voie à explorer, il s’agit de se reconnecter au corps. On s’en inspire en coaching : si votre transformation était un mouvement, quel serait-il ?
HP : s’adapter sans se trahir
Il s’agit là de la question de la vision de soi. Il est normal de s’interroger et de ne pas savoir qui on est à certains moments de sa vie. Si on est incapable d’y répondre, une clef est peut-être d’arrêter de chercher et de se mettre à l’écoute des autres, des besoins de l’entreprise ou de l’univers. Quand on se met à l’écoute, des opportunités viennent. Une autre piste : aller à la rencontre de personnes où il y a cette même magie dans l’échange.
HP et épanouissement professionnel
Les HP peuvent être naturellement attirés vers les métiers en rapport avec l’innovation. Certains sont dans le regret de ne pas avoir été dans un métier où ils font des recherches sur la structure même de la réalité. Dans l’innovation, il y a un regard particulier sur l’univers et la nécessité de proposer des axes de transformation pour avancer. Mais ce qui va être important pour un HP est d’avoir une marge de manœuvre dans son travail.