Un nouvel article des éditos de la rédac’ publié par Catherine Testa sur LinkedIn…
Mon cher lecteur,
Déjà la fin de l’année… Le mois de décembre sonne souvent l’heure du bilan des 12 mois écoulés : qu’ils ont été riches ! Je dois avouer que j’ai fait les montagnes russes, passant de ce besoin vital de parler de « bonheur en entreprise » à celui d’éviter d’en parler tant le sujet était mal compris, tant on oubliait la vision systémique du système, tant on malmenait la thématique.
Aujourd’hui je tente de me plier à l’exercice du bilan et de la prospective avec beaucoup d’humilité. Tu le sais, je déteste l’arrogance et le léger complexe de supériorité de ceux qui se disent « spécialistes » de telle ou telle thématique. S’i il y a bien une chose dont je suis certaine c’est que je ne suis nullement madame Irma ! Mes réflexions sont basées sur ce qu’il se passe sur le terrain. Loin de juger si cela est bien ou non, j’essaie d’analyser et de diffuser. A chacun de se faire son idée.
Cette année, on m’a souvent fait confiance pour réfléchir à l’entreprise de demain au regard de ma conviction : l’urgence de mettre les trop-plein d’égo de côté pour revaloriser toutes les formes d’intelligences des salariés. Tu le sais, j’ai tendance à dire que j’aime les gens et je m’émerveille de cette diversité des intelligences ; intelligence sociale, intelligence créative, intelligence émotionnelle… Il me semble que c’est sur cette diversité des intelligences qu’il faut s’interroger pour construire l’entreprise de demain. Mon interrogation : comment capitaliser sur la richesse des salariés et envisager l’entreprise comme une « plate-forme de singularités » et mettre les égo de côté ?
La première richesse des entreprises n’est-elle pas la richesse humaine ?
L’humain au cœur de l’entreprise…
- Au regard de l’intelligence artificielle
Soyons honnête, jusqu’à aujourd’hui, l’entreprise (dans son fonctionnement post tayloriste) a donné de la valeur à l’intelligence logique et rationnelle. S’il fut un temps où cela répondait aux besoins, est-ce encore le cas aujourd’hui ? Veux-tu savoir pourquoi je me pose cette question ? A cause de cette intelligence qui est en train de voler la vedette : l’intelligence artificielle.
Ce nouveau « buzzword » fait fantasmer : tout le monde y va de sa prédiction. La thématique me passionne mais je n’ose pas me prêter au jeu des prédictions. On peut légitimement penser que l’enjeu de demain sera la complémentarité « Homme-machine ». L’homme sera augmenté et parfois remplacé.
Une question légitime est donc : quel avantage compétitif à être un humain demain ? Probablement l’authenticité, la créativité et la singularité. Ces côtés si souvent éteints ou ignorés dans le monde de l’entreprise actuelle… Comment les re-valoriser ? Probablement en offrant un terreau où le salarié puisse s’exprimer.
- Au regard d’un monde de plus en plus transparent
Je parle souvent de révolution des « Silencieux »… L’avènement des réseaux sociaux, (notamment de LinkedIn qui devient de plus en plus « plate-forme d’expression »), facilite le partage des informations.
Quand j’étais étudiante, les cabinets de conseil faisaient rêver et attiraient sur les campus : les étudiants avaient pour seul indicateur ce qui était visible de l’extérieur. Aujourd’hui, des applications permettent de connaître l’ambiance dans l’entreprise. Un message sur un réseau social suffit à nous mettre en contact avec un salarié…
Dans ce monde de plus en plus transparent, l’entreprise se devra d’être exemplaire et alignée avec ses enjeux marketing. Les silencieux vont de plus en plus s’autoriser à parler : remettre en question les systèmes, noter les dissonances…
Personnellement je trouve que c’est tant mieux ! Mais quel danger pour les entreprises qui n’en n’ont pas encore pris conscience !
- Au regard d’un monde où la confiance se redessine
J’aime à le rappeler : nous vivons dans notre propre algorithme. Va écouter du flamenco sur youtube, on te proposera du flamenco, va lire un article sur l’IA, on te proposera un autre article sur le sujet, va liker un article marqué à droite ou à gauche, on te proposera d’autres articles de la même tendance. L’algorithme cautionne nos croyances. Nous vivons au travers d’un prisme déformant de la réalité passant à côté de la vision globale.
Avouons-le, c’est très utile dans le monde du marketing ou des médias. Actuellement, l’internaute ou l’acheteur semble l’ignorer. Quand cela ne sera plus le cas, l’entreprise devra regagner la confiance du consommateur. Cela passera probablement par plus de sincérité et par plus d’authenticité. L’entreprise oublie trop vite que son salarié est probablement son ambassadeur numéro 1.
Ne serait-il pas l’heure d’y prêter attention ?
- Au regard d’un monde où la frontière pro et perso est de plus en plus ténue
On parle souvent de limiter l’impact de la vie pro dans la vie perso. Et si on posait le problème différemment ? Si on réfléchissait à « comment être soi-même dans le monde de l’entreprise? ». En entrant dans une société, on adopte souvent le costume « corporate » laissant de côté son identité. « Oui, je sais peindre et créatif, mais dans la vie professionnelle je ne suis « que » comptable » et l’entreprise ne s’intéresse qu’à cette dernière capacité.
Dans un monde de l’entreprise très annihilant, on nous met dans une boite (d’ailleurs, on parle de boîte pour nommer son entreprise), on nous donne un périmètre qu’on ne doit pas dépasser. N’est-ce pas, en soi, une sorte de dépossession de l’individu ? N’est-ce pas mettre de côté ses forces propres au seul profit du métier qu’on doit exercer ? Ce mode du travail d’hier correspond-t-il au mode de travail demain ?
Je suis convaincue que toute entreprise doit s’intéresser à son salarié par pur bon sens. Comment faire me diras-tu ? Mais enfin, en mettant des babyfoots, c’est logique ! Je souris quand je vois ce prisme « débilisant » des babyfoots et la façon dont le sujet est traité dans les médias mainstream. S’il te plaît, évite le mode de pensée binaire : pour ou contre. Bien loin des injonctions au bonheur, c’est au contexte global qu’il faut t’intéresser…
Mes sujets de réflexion pour 2018 …
- « Bonheur » au travail et CHO
Souvent on me demande pourquoi j’ai co-fondé le club de CHO. Pour la simple et bonne raison que j’étais certaine qu’on y rencontrerait des personnalités tournées vers les autres, des personnalités avec ce sens de l’humilité qui manque trop dans le monde de l’entreprise.
Notre objectif est de trouver comment permettre à toutes les intelligences de cohabiter sur un même territoire et redonner sa place à chaque salarié.
Bien loin de chercher le meilleur endroit pour mettre en place un babyfoot, il s’agit de chercher tous les moyens permettant au salarié de mieux vivre dans sa société, qu’il s’agisse des nouveaux types de management, des actions simples à mettre en place, des outils tech, etc…
Et tu sais, les chiffres parlent d’eux-mêmes. En quelques mois, plus de 150 entreprises nous ont rejoints, du groupe Nuxe à Marc Dorcel, de Boiron à la Société Générale, du groupe Seb à Orange. Evidemment, tout le monde vient dans la plus grande humilité car il n’y a pas de solution unique : tout est expérimental. Notre enjeu est de partager des idées. Tu sais, on en parle peu mais aujourd’hui, ce sont plus de 80% des groupes du CAC 40 qui travaillent sur le sujet ! Entre ce futur du travail idéal et l’état actuel, il y a encore du boulot mais il faut commencer et essaimer, souvent dans le silence…
Bien-sûr, cela ne passe pas par le seul CHO ! Dans le club ce sont des RH, des managers, des responsables QVT, des DG, des managers, etc… qui échangent ensemble. Leur point commun ? L’humilité devant la tâche, l’écoute des autres et l’expérimentation.
Oter le costume et faire fi de son « niveau hiérarchique » pour s’enrichir.
- Digitalisation & humain
Oh tu le sais, j’affectionne le digital depuis des années tant cela nous oblige à nous réinventer. S’il fut un temps où il s’agissait simplement de « digitaliser », à savoir d’importer de la « tech » dans l’existant pour faire face aux nouveaux modes de travail, je crois que ce temps est révolu.
Ceux qui explorent le futur du travail doivent se poser la question de leur business model de demain. Bien loin des enjeux de digitalisation de tel ou tel métier, il s’agit de se demander : qu’est-ce qui aura de la valeur demain ? Pour l’anticiper dès aujourd’hui. Tu sais, la valeur de ton entreprise demain n’a peut-être aucun rapport avec ton métier d’aujourd’hui, aussi difficile à admettre cela soit-il.
C’est en détectant les intrapreneurs internes que tu auras de nouvelles idées, c’est en demandant à ceux au plus près du terrain leurs idées que tu dénicheras de nouveaux concepts : cette fameuse notion de la subsidiarité. Et surtout, c’est en ré-injectant de l’humilité que le PDG permettra à son entreprise de se ré-inventer (son rôle, parfois, n’est autre que celui de gestionnaire optimisant des flux financiers)…
- La vision systémique
Je ne peux m’empêcher de penser que le monde du travail répond aux enjeux sociétaux.Si l’entreprise s’adapte, c’est que la société change, le monde du « freelancing » est probablement un changement culturel et non un simple changement dans l’organisation des entreprises. Comme il est difficile de penser global et de sortir de sa culture corporate. Le digital est au service de l’humain (du moins aujourd’hui…)
Tu sais ce qui me permet de coller à la réalité ? Notre site www.loptimisme.com. Quand nous avons créé ce site il y a 2 ans, c’était en réaction au flot d’informations anxiogènes qui nous arrivaient. Aujourd’hui nous touchons chaque semaine plusieurs millions de personnes. Cela pourrait sembler être un détail décorellé du futur de l’entreprise : je pense précisément que c’est l’inverse. On cloisonne trop souvent B2B et B2C.
Nous avons une chance immense : celle de fédérer autour d’une valeur qui décloisonne. Un lecteur est tout à la fois un employeur et un employé, un cadre sup ou un ouvrier, une génération X et une génération Z. Et les messages que nous recevons nous permettent une vision assez globale de la société loin des clichés « oh mon Dieu la génération Z est tellement différente ». C’est probablement cette écoute de la population qui nous met régulièrement des claques quand nous sommes trop égo-centrés avec quelques illusions qui nous semblent être des vérités.
Je crois que chaque entreprise devrait se poser cette question, arrêter de penser clients, prospects, salariés… mais chercher à penser individus & singularités et comprendre son empreinte dans un contexte sociétal.
Conclure, conclure, conclure…
Il paraît qu’il faut faire « court » dans les articles : encore une fois, quel échec ! Je suis tellement convaincue du besoin de penser global pour agir local que m’interroger sur le futur du travail revêt des dimensions multiples que j’avais à cœur d’évoquer !
Au demeurant, j’ai quelques convictions :
- L’importance de l’humilité : on oublie trop facilement que sans l’éboueur présent pour gérer un flux de déchets, aucun système ne fonctionne. Comment ose-t-on prendre de haut des personnes indispensables au bon fonctionnement de l’entreprise ? Nous sommes tous dépendants les uns des autres. Il serait temps de le comprendre.
- L’importance de l’agilité : et qui dit agilité dit probablement simplicité. Il faudra être capable de muter, et rapidement. Ces process, ces faux-semblants sont paralysants…
- L’importance de la gentillesse : tu sais, au fond, personne ne se rappellera de ton superbe canapé ou de tes magnifiques chaussures, ni même de ton superbe bureau. Ce qui restera, ce sont les émotions que tu auras fait vivre aux autres. Et je dois te dire que j’ai rencontré aux fonctions les plus stratégiques des personnes adorables… Etre gentil ne grille pas de neurones… vivement que tout le monde s’en rende compte.
Comme tu peux l’imaginer 2018 sera pour moi comme 2017 : profondément exploratoire.Mettre de côté mes pré-supposés et tester. Je ne saurais trop te dire à quel point il est enthousiasmant de découvrir toutes les démarches mises en place dans les groupes et d’y participer ! Si j’ai un message à te faire passer, c’est d’EXPERIMENTER avec une bonne d’humilité.
C’est un peu ça la révolution des silencieux dont je te parle souvent : celle de ceux qui osent dire qu’une entreprise avec plus d’humanité est peut-être une solution pour demain…
La naissance est le lieu de l’inégalité. L’égalité prend sa revanche avec l’approche de la mort. Jean d’Ormesson.
A très bientôt,
Catherine.
Contact : catherine.testa@loptimisme.com
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