Le désengagement des salariés est au cœur des réflexions de l’entreprise. Un salarié désengagé est moins performant, moins épanoui et il sera donc plus difficile à retenir. Améliorer l’engagement des collaborateurs est donc une priorité pour beaucoup de grandes organisations.
A côté de cela, un autre phénomène prend de plus en plus d’ampleur : le sur-engagement en entreprise. Comment gérer un salarié trop investi ? Celui qui ne fait pas de pause, qui commence tôt et finit tard, sans jamais paraître satisfait de lui-même ? On parle d’ergomanie, c’est-à-dire de dépendance au travail. Et comme tout dépendance, celle-ci peut nuire à la santé.
Salariés passionnés, sur-engagés, ergomanes… quelles différences ?
Notion largement utilisée par les grandes entreprises, l’engagement se caractérise par la contribution volontaire du salarié. Plusieurs termes sont couramment utilisés pour parler de cette notion. La satisfaction qui est de l’ordre de l’affectif. Un collaborateur peut être satisfait de son travail mais ne pas en être pleinement acteur.
La motivation qui renvoie à l’envie, la volonté de la personne d’aller travailler tous les matins, de s’investir dans la durée au sein de son organisation. L’engagement dépasse donc ces termes et va plus loin, par la transformation de l’envie en action.
L’accélération de la digitalisation et de la flexibilité du travail de ces dernières années ont rendu la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle plus poreuse. Ajoutons à cela une pression accrue de la part des managers sur leurs équipes ; ce n’est donc pas étonnant de voir de plus en plus de salariés sur investis, voire au bord de l’épuisement professionnel. En effet le burn-out survient lorsqu’un salarié est tellement engagé qu’il s’épuise dans son travail.
Attention cependant à ne pas faire de raccourci, un profil sur-engagé ne va pas nécessairement connaître un épisode d’épuisement professionnel.
Ronald J. Burke, un des spécialistes du workaholism, parle d’ergomanie. Une personne ergomane travaille de façon excessive, répondant à une pression soit interne soit externe, dans l’objectif d’apaiser son anxiété ou sa culpabilité de ne pas « assez » en faire.
On peut estimer qu’un temps de travail supérieur à 50h par semaine conduit à une situation de dépendance et un rapport compulsif à son activité voire pathologique.
Le collaborateur ergomane travaille plus que ce qui lui est demandé, sans pouvoir lâcher prise. Il pense sans cesse à son travail aussi bien dans le cadre de son activité que dans la sphère privée. Cette situation crée une spirale infernale car la personne sur-engagée se fatigue plus, elle est donc moins performante, se sent coupable et incompétente, ce qui la pousse à en faire davantage.
Savoir identifier l’addiction au travail
Une personne sur-investie est addicte. Elle abat un travail considérable de façon compulsive et ne parvient pas à déléguer.
Il est possible d’identifier ce comportement en prêtant attention à plusieurs critères :
- Le temps de travail : la personne addicte consacre énormément de temps à son activité. Elle ne compte pas ses heures, arrive la première et part généralement la dernière du bureau.
- La valorisation : son estime de soi est fortement conditionnée à son travail. Elle pense ne pouvoir se réaliser qu’à travers celui-ci. Une personne ergomane présente donc une certaine anxiété, la peur de n’en faire pas assez, un sentiment de culpabilité en cas d’oisiveté.
Plusieurs raisons expliquent ce phénomène : la pression sociale, la peur de se retrouver sans emploi et sans ressource, le besoin de réussite ou de reconnaissance, la volonté de combler un manque personnel, etc.
Le dernier symptôme qui doit alerter les managers est l’état de stress du salarié. Si le stress est trop intense, menant la personne à une profonde tristesse, un sentiment d’inutilité, une baisse flagrante de motivation, alors cette personne est proche de l’épuisement professionnel.
Prévenir et éviter le sur-engagement
Le Japon a un mot pour qualifier la mort par excès de travail : le Karoshi. Suite à de nombreux décès en entreprise, les sociétés japonaises ont pris des mesures. Certaines coupent l’électricité après 22h pour restreindre les horaires de travail, d’autres ont instauré la sieste au travail, la semaine de 4 jours ou les vacances obligatoires.
Avant d’en arriver à cet extrême, il est possible de prévenir le sur-engagement en portant une attention particulière aux salariés très investis. Une fois le sur-engagement évalué, il est nécessaire d’intervenir pour repenser l’organisation du travail avec la personne concernée. L’objectif est de l’aider à retrouver un équilibre entre sa vie professionnelle et personnelle, encourager la reprise d’activiés extraprofessionnelles et limiter sa charge de travail pour éviter le stress.