Le bien-être au travail est un sujet sensible sur lequel nous écrivons depuis presque 8 ans maintenant.
Et si on faisait un bilan après 8 ans ?
Alors que certaines entreprises en ont fait une priorité, d’autres se demandent si cet idéal est réellement atteignable ou simplement une illusion séduisante.
Décryptage.
Bien-être au travail : l'évolution au fil des années
Commençons par parler du travail et faisons quelques pas de recul.
Le travail a toujours été une composante centrale de la vie humaine, mais notre façon de le percevoir a radicalement changé au fil du temps.
Alors que les générations précédentes voyaient le travail principalement comme un moyen de survie, les discussions actuelles tournent davantage autour de l’épanouissement personnel et professionnel.
De la survie à l'épanouissement
Il n’y a pas si longtemps, la plupart des gens travaillaient uniquement par nécessité. L’objectif était simple : mettre de la nourriture sur la table et avoir un toit au-dessus de sa tête. Pour beaucoup, les emplois étaient répétitifs, physiquement exigeants et ne laissaient aucun espoir de développement personnel ou professionnel.
Le travail était une simple transaction : vous donniez votre temps et vos efforts en échange d’un salaire. Parler de « bien-être » dans ce contexte semblait inconcevable.
Il serait hypocrite de dire que cela ne reste pas une réalité pour une partie de la population.
Cependant, la notion de sens du travail est devenue de plus en plus présente au fil des dernières décennies.
Des questions telles que « Est-ce que ce travail me rend heureux ? » ou « Est-ce qu’il me permet de grandir en tant qu’individu ? » sont envisageables.
Ces questions sont particulièrement présentes chez les jeunes générations, mais elles concernent plus globalement la population ! Penser que seule la génération Z a envie de sentir bien sur son lieu de travail est une erreur.
D’où vient ce changement ? Probablement du changement de la nature même du travail mais aussi des réseaux sociaux.
Le bien-être au travail ces 10 dernières années
Nous avons commencé à fédérer les acteurs engagés sur la qualité de vie au travail (QVT) en 2016. En 2017, nous avons créé ce site en 2017. L’idée était simple : parler de santé au travail, de condition de travail, d’amélioration des condition de travail… bref de la vie professionnelle.
On ne s’en rappelle plus, mais le sujet était encore marginal à l’époque. On avait entendu parler de mal-être au travail au moment du scandale de France Telecom mais le sujet du bien-être au travail s’invitait peu dans l’espace public.
Nous étions d’ailleurs intervenus au Sénat sur le sujet de la santé au travail.
À l’époque, parler de bien-être au travail était se soumettre à de nombreuses critiques : scepticisme, moqueries, et, au mieux, de l’indifférence.
🤯Nous ne donnerons pas de noms mais certains RH nous affirmaient que ce n’était pas un sujet. Autant vous dire que ces RH n’étaient pas dans les clous au niveau des risques psychosociaux (et ne le sont toujours pas…)
➡️Des professionnels sensibilisaient au sujet nous disaient ne pas oser liker nos posts sur les réseaux sociaux de peur d’être jugés !
L’idée que le bien-être pouvait être un levier n’était pas prise au sérieux.
Evidemment, nous ne nous sommes pas démontés et certains d’entre vous étaient déjà présents pour nous raconter les actions mises en place dans vos sociétés. Nous avons publié des milliers de contenus sur le management, le télétravail, la prévention des risques professionnels, mis en avant des DRH engagés et parlé de santé mentale avant qu’elle ne soit une cause nationale.
Puis la situation s’est totalement inversée. La qualité de vie au travail a été prise au sérieux. De plus en plus de personnes se sont engagés.
D’ailleurs, nos chiffres ne mentent pas.
🌟 Plus de 300 000 personnes nous suivent rien que sur LinkedIn.
🌟 Dont près de 30 000 RH engagés autour du sujet !
🌟 Des sujets naguère tabous – comme la santé mentale – ont enfin été pris au sérieux et sont même devenus des causes nationales !
La qualité de vie au travail est devenu un sujet dont on a de plus en parlé avec évidemment quelques dérives.
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Critique du bien-être au travail
Grâce à vous et grâce à ce réseau incroyable, nous portons un regard lucide sur le sujet du bien-être au travail. Il nous semble important d’oser dire les choses.
L'happy-washing
Certaines entreprises ont très vite compris que de parler de la qualité de vie au travail était un fort levier de communication.
Il y a donc parfois un réel décalage entre la culture d’entreprise affichée à l’extérieur de l’entreprise et la réalité.
Rassurez-vous : cela ne tient pas très longtemps. A l’ère de la transparence, on sait vite si il y a un total décalage entre le discours et le terrain.
L’objectif ne doit pas être en premier lieu la communication. D’ailleurs, à être très honnêtes, la majorité des entreprises avec lesquelles nous travaillons préfèrent ne pas parler de leurs actions à l’extérieur : elles savent que c’est tendre le bâton pour se faire battre.
Une injonction à la positivité
Nous avons vu quelques start-up se brûler les ailes en confondant bien-être au travail et injonction à la positivité.
« Dans ma précédente entreprise, il fallait sourire. Le fameux team spirit. On nous faisait remarquer que notre mauvaise humeur plombait l’ambiance. Certains étaient convoqués pour cette raison et on finissait par les remercier. »
Les humains ont des hauts et des bas : journées difficiles, stress réguliers et défis divers.
Attendre des employés qu’ils cachent leurs émotions authentiques pour préserver « la bonne ambiance » peut être nuisible. Il s’agit même d’un risque psychosocial !
Le bonheur comme outil de productivité
Il est facile de comprendre pourquoi les entreprises ont intêret au bien-être de leurs collaborateurs.
Des nombreuses études montrent que des collaborateurs heureux sont plus engagés, créatifs et productifs.
Cependant, une question se pose : cette engagement sur les sujets de la QVCT est-elle réellement axée sur le bien-être des employés, ou simplement un levier pour améliorer les performances ?
« Je travaille dans une PME. J’ai mis 5 ans à faire comprendre à mon patron que le sujet devait être porté. Il a fini par comprendre quand je lui ai montré les chiffres de l’absentéisme et le ROI qu’on pouvait tirer à mettre en place des actions pour l’amélioration des conditions de travail. »
Le bien-être est un outil de productivité : cela peut sembler cynique mais il est vrai que tout le monde n’est pas encore convaincu et qu’il faut parler à certains DAF avec des arguments financiers.
La poussière sous le tapis
Certaines entreprises investissent dans des avantages comme des salles de détente, des snacks gratuits ou des applications de bien-être, souvent présentés comme un engagement envers les salariés.
Cependant, si les conditions de travail sous-jacentes restent stressantes ou intenables, ces efforts peuvent sembler superficiels.
Une machine à café dernier cri ne suffira pas à compenser des longues heures ou un leadership déficient.
La problématique avec le bien-être au travail est qu’il s’agit d’un sujet à 360°. Il est souvent plus facile pour les entreprises de mettre en place des actions pour améliorer l’environnement de travail que mettre en place un vrai plan d’actions visant à réfléchir à l’organisation du travail, former les collaborateurs et prendre de réelles décisions.
C’est un premier pas et il faut le voir comme tel. Souvent nécessaire mais non suffisant.
Des frontières floues
Aussi paradoxal cela puisse paraître, le bien-être peut brouiller les limites entre vie personnelle et professionnelle.
Certaines entreprises poussent la métaphore du « comme en famille » à l’excès, exigeant une loyauté et un engagement émotionnel sans prêter attention aux fondamentaux comme les limites pour concilier vie pro / vie perso.
Cela peut provoquer un sentiment de manipulation.
« Je travaillais dans une start-up. Le soir, c’était bar ou resto. On te faisait sans cesse remarquer que les conditions de travail étaient bonnes et on nous disait « On est une famille ». C’était pervers. Je me sentais obligée de sortir avec eux. Je voyais bien que des choses clochaient mais j’avais l’impression d’être la seule à ne pas valoriser cette culture d’entreprise. Quand je suis partie, les langues se sont déliées. »
Un culture bien-être peut comporter des messages subtils selon lesquels les employés doivent toujours « être reconnaissants », même dans des conditions défavorables. Cela les dissuade de soulever des préoccupations légitimes liées à des charges de travail écrasantes, des conflits de valeur ou des opportunités de carrière limitées.
Les salariés qui expriment de l’insatisfaction risquent d’être stigmatisés ou mis à l’écart, ce qui les isole davantage.
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Le bien-être au travail : un sujet sourcé
Il nous paraissait important d’oser dire les choses. Comme dans de nombreux domaines, les pratiques peuvent être détournées.
Mais rassurez-vous : la grande majorité des personnes s’engageant dans le domaine de la qualité de vie au travail sont des personnes convaincues essayant de faire avancer les pratiques.
Le bien-être au travail ne doit pas être un rêve inaccessible. Ce n’est pas une quête de perfection, mais une approche concrète pour améliorer le ressenti des employés dans leur quotidien.
En abordant les facteurs essentiels, il est possible de créer un environnement plus sain. Bonne nouvelle : ce sujet est largement sourcé. De nombreuses études et guides existent pour avancer sur ce sujet.
Les fondements du bien-être au travail
Nous avons dédié de nombreux articles au sujet de la qualité de vie au travail.
Citons quelques éléments qui peuvent être une base de travail pour toute entreprise.
Cette liste (non exhaustive) vous permet de mesurer que certaines actions ne coûtent absolument rien si ce n’est d’informer et de former…
✅ 1. Organisation, contenu et réalisation du travail
- Assurer des conditions matérielles et temporelles adaptées
- Permettre aux salariés d’effectuer un travail de qualité
- Favoriser l’équilibre entre vie pro et perso
✅ 2. Projet d’entreprise et management
- Donner du sens au travail en alignant les objectifs stratégiques et individuels
- Développer un management bienveillant, à l’écoute et soutenant
- Encourager l’engagement et l’implication des équipes
✅ 3. La reconnaissance et la valorisation
- Être reconnu pour ses efforts et ses réussites
- Recevoir des feedbacks constructifs et motivants
- Se sentir apprécié par ses collègues et sa hiérarchie
✅ 4. Égalité au travail
- Garantir un accès équitable aux opportunités professionnelles
- Lutter contre les discriminations liées au genre, à l’âge, au statut ou au métier
- Veiller à une gestion des ressources humaines équitable
✅ 5. Dialogue social et professionnel
- Encourager les échanges et la co-construction des conditions de travail
- Permettre aux salariés d’exprimer leurs besoins et attentes
- Mettre en place des espaces de discussion et d’amélioration continue
✅ 6. Santé au travail et prévention des risques
- Prévenir les risques psychosociaux et physiques
- Favoriser un environnement de travail sain et sécurisé
- Accompagner les salariés dans leur bien-être et leur qualité de vie
Le bien-être au travail : un sujet subjectif
Des études sur le bien-être au travail et la QVT indiquent de façon claire leurs composantes. Mais il s’agit d’un sujet encore très complexe.
Si l’idée de s’épanouir pleinement dans son poste séduit, il n’y pas de recette miracle.
Notre perception du bien-être au travail est influencée par de nombreux facteurs personnels, professionnels et culturels.
Ce qui apporte de la joie à une personne peut être un fardeau pour une autre.
Vous l’avez déjà sûrement remarqué : un team-building peut être source de joie pour la majorité des collaborateurs et une angoisse totale pour les introvertis. Certains se fichent d’avoir des plantes vertes dans les espaces de travail. Dans un même bureau à un même poste on peut avoir un salarié heureux et un autre fustigeant la politique RH.
Le bonheur au travail est ainsi une notion profondément subjective.
Ce qui apporte satisfaction à un individu peut être une source de frustration pour un autre.
C’est même vrai au niveau de l’organisation du travail. Tandis que certains s’épanouissent dans des environnements de travail en construction, d’autres recherchent davantage de calme, de structure et de prévisibilité. Les goûts, les préférences et les expériences façonnent radicalement la perception du bien-être au travail.
Un sujet collectif
Ce qui fonctionne dans une organisation peut ne pas convenir ailleurs.
Et même au sein d’une même entreprise, les interprétations de la satisfaction peuvent varier.
Pour les employeurs, il est donc crucial de reconnaître ces différences, plutôt que de miser sur une approche universelle qui est souvent inefficace.
Proposer des options personnalisées, faîtes un baromètre et surtout écouter les attentes des collaborateur.
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Trouver un équilibre entre réalisme et aspiration
Le sujet du bien-être est passionnant et 8 ans après, notre équipe est toujours aussi passionnée par le sujet.
Mais la quête du bien-être au travail doit trouver un juste milieu entre des attentes réalistes et des objectifs inspirants.
Tout emploi a son lot de contraintes, de stress et de tâches ingrates. Même chez nous !
Imaginer un monde où tout est parfait risque de créer des désillusions et des frustrations pour les salariés, tout autant que pour les managers.
⚠️Nous profitons de ce très long article (si vous l’avez lu jusqu’ici c’est que le sujet vous intéresse) pour passer un message de prévention à toutes celles et ceux qui s’engagent sur le sujet.
Il s’agit d’un marathon. Cela prend du temps. Nous avons vu au fil des années plusieurs de nos lecteurs partir en burn-out pour avoir essayer de trop en faire.
➡️Trouver un équilibre est essentiel. Le bien-être au travail ne consiste pas à atteindre la perfection, mais à garantir un environnement où les employés se sentent soutenus, écoutés et respectés, même dans un contexte imparfait.
Il ne s’agit pas d’une destination figée, mais une dynamique permanente à revisiter.
Pour les demandes de conférences ou de formation sur le sujet : rose@loptimisme.com
L’équipe de l’Optimisme propose plusieurs formats (conférences, ateliers et formations) pour sensibiliser vos équipes au bien-être au travail et à la santé mentale.
Pour toutes demandes vous pouvez contacter : rose@loptimisme.com