La prise de décision fait partie de notre au quotidien à tous, mais nous sommes peu nombreux à avoir eu un module « prise de décision » à l’école.
Pourtant, dans le monde professionnel, chaque décision peut impacter le succès de entreprise.
Comprendre les mécanismes psychologiques qui influencent notre jugement est crucial.
Les biais cognitifs, ces distorsions automatiques de la pensée, jouent un rôle souvent sous-estimé dans la prise de décision au travail. De l’escalade d’engagement au biais d’ancrage, ces mécanismes peuvent mener à des choix peu judicieux, affectant tous les domaines, depuis la gestion de projet jusqu’aux politiques RH.
Cet article explore cinq biais cognitifs essentiels que tout professionnel, qu’il soit entrepreneur, salarié, gestionnaire RH ou dirigeant, doit comprendre pour optimiser sa prise de décision et favoriser une culture d’entreprise plus éclairée et efficace.
Biais Cognitif 1: L'Escalade d'Engagement
Qu’est ce que c’est ?
L’escalade d’engagement désigne la tendance à continuer d’investir dans un projet ou une décision malgré l’évidence croissante de son échec. Ce phénomène est souvent motivé par le désir de ne pas admettre une erreur, menant à une accumulation d’investissements en temps, en argent, et en ressources, dans l’espoir de renverser une situation défavorable.
Impact dans le travail :
Dans le contexte professionnel, l’escalade d’engagement se manifeste fréquemment lorsqu’un projet commence à dévier de ses objectifs initiaux sans atteindre les résultats escomptés. Plutôt que de reconsidérer ou d’arrêter le projet, les dirigeants et les équipes continuent d’y investir des ressources, souvent exacerbés par ce qu’ils ont déjà dépensé. Cela peut se traduire par des projets informatiques qui dépassent largement leur budget et leur délai, des initiatives de marketing qui ne donnent pas les fruits attendus, ou des stratégies de développement de produit qui restent poursuivies malgré des feedbacks négatifs du marché.
L’escalade d’engagement peut coûter des millions à une entreprise, non seulement en ressources gaspillées mais aussi en opportunités manquées d’investir ailleurs.
Conseils pour le limiter :
Pour contrer l’escalade d’engagement, plusieurs stratégies peuvent être mises en place :
- Évaluation périodique des projets : Instaurez des points de contrôle réguliers où les projets sont évalués de manière objective. Cela implique de fixer des critères clairs et mesurables dès le début du projet pour évaluer son succès ou son échec à ces points de contrôle.
Séparation des décisions d’investissement : Assurez-vous que les décisions d’investissement supplémentaires soient prises par des parties prenantes qui n’étaient pas impliquées dans les décisions initiales. Cette approche aide à fournir une perspective neuve et objective.
Culture d’entreprise favorisant l’apprentissage : Mettez en place une culture où l’erreur est vue non pas comme un échec mais comme une opportunité d’apprentissage. Cela peut être soutenu par des formations sur la prise de décision et des retours d’expérience réguliers où les équipes discutent ouvertement des succès et des erreurs.
Utilisation de données externes : Encouragez l’utilisation de données et d’analyses externes pour évaluer les projets. Un tiers (par exemple un expert du domaine qui apporte une anaylyse sur le projet ) peut permettre une perspective externe moins biaisée par l’investissement émotionnel ou financier déjà réalisé.
Biais Cognitif 2: Le Biais de Confirmation
Qu’est-ce que c’est ?
Le biais de confirmation, c’est un peu comme avoir des œillères. C’est cette tendance que nous avons tous à prêter plus d’attention aux informations qui renforcent ce que nous pensons déjà être vrai, et à ignorer ou minimiser celles qui pourraient nous contredire.
C’est comme si notre cerveau disait : « Ne m’embête pas avec les faits, j’ai déjà pris ma décision ! »
Impact dans le travail :
Au travail, ce biais peut vraiment jouer des tours. Imaginez que vous devez embaucher quelqu’un. Sans même vous en rendre compte, vous pourriez favoriser les candidats qui partagent vos opinions ou qui ressemblent à l’idée que vous vous faites d’un « bon » employé, plutôt que de vraiment évaluer chacun selon ses mérites. Ou peut-être qu’en planifiant le lancement d’un nouveau produit qui vous plaît, vous ne retenez que les études de marché positives et ignorez les signaux d’alerte.
Ce biais peut conduire à des décisions peu judicieuses, des erreurs coûteuses, et même vous faire passer à côté d’opportunités innovantes.
Conseils pour élargir votre perspective :
Diversifiez vos sources : Faites un effort conscient pour chercher et examiner des opinions et des données qui contredisent votre point de vue initial.
Encouragez le débat : Dans les réunions, encouragez activement vos collègues à exprimer des opinions différentes et à remettre en question les idées reçues. Cela peut aider à créer un environnement où il est sécuritaire et valorisé de remettre en question et de réévaluer. Vous pouvez même donner le rôle de « contradicteur » à une personne lors des réunions.
Réflexion critique : Avant de prendre une décision importante, prenez un moment pour réfléchir de manière critique aux informations que vous avez utilisées pour y arriver. Demandez-vous si vous avez vraiment considéré toutes les alternatives ou si vous avez succombé au biais de confirmation.
Utilisation de processus formels : Mettez en place des processus décisionnels qui exigent la prise en compte et l’analyse de toutes les données pertinentes, pas seulement celles qui soutiennent la première idée ou proposition.
Biais Cognitif 3: L'Effet de Cadrage
Qu’est-ce que c’est ?
L’effet de cadrage est la façon dont nos décisions sont influencées par la manière dont l’information nous est présentée. Selon que l’information est formulée positivement ou négativement, nos choix peuvent changer radicalement, même si les faits sous-jacents restent les mêmes. C’est un peu comme regarder une photo : le cadrage peut totalement modifier votre perception de ce que vous voyez.
Impact dans le travail :
Dans le milieu professionnel, l’effet de cadrage est partout. Par exemple, si un chef de projet présente un retard comme une « occasion d’améliorer le produit », l’équipe peut voir le retard de manière positive. À l’inverse, si le retard est décrit comme un « problème grave », l’équipe peut le percevoir de manière beaucoup plus négative.
Ce biais affecte aussi la façon dont nous interprétons les performances, les résultats financiers, et même les retours des clients. L’effet de cadrage peut donc orienter les décisions stratégiques, les évaluations de personnel, et même la manière dont les changements sont gérés au sein de l’entreprise.
Conseils pour limiter son impact :
Soyez conscient du cadrage : La première étape pour contrer l’effet de cadrage est de devenir conscient de son influence. Lorsque vous recevez des informations, prenez un moment pour réfléchir à la façon dont elles sont présentées et envisagez comment un cadrage différent pourrait influencer votre perception.
Reformulez les informations : Lorsque vous devez prendre une décision importante, essayez de reformuler les informations de plusieurs façons différentes. Cela peut vous aider à voir les choses sous un angle neuf et à éviter de vous laisser influencer par le cadrage initial.
Demandez des avis extérieurs : Parfois, il est utile de demander l’opinion de personnes qui n’ont pas été impliquées dans la formulation initiale des informations. Elles peuvent voir les choses différemment et vous aider à identifier des cadrages que vous n’aviez pas envisagés.
Utilisez des données numériques pour contrebalancer le cadrage : Lorsque c’est possible, appuyez-vous sur des données quantitatives pour prendre vos décisions. Les chiffres sont souvent moins susceptibles d’être influencés par la manière dont ils sont présentés.
Biais Cognitif 4: Le Biais d'Ancrage
Qu’est-ce que c’est ?
L’effet d’ancrage se produit lorsque nous nous appuyons trop sur la première information que nous recevons pour faire des décisions subséquentes. Cette première pièce d’information, l’ancre, tend à avoir une influence disproportionnée sur notre jugement, même si des informations supplémentaires sont disponibles par la suite. C’est comme fixer le premier chiffre que vous voyez sur une étiquette de prix et juger toutes les offres suivantes par rapport à cette valeur initiale.
Impact dans le travail :
Dans le monde du travail, cet effet peut avoir des répercussions significatives. Par exemple, lors de négociations salariales, le premier montant mentionné peut devenir le point de référence autour duquel toutes les discussions ultérieures gravitent, qu’il soit justifié ou non.
L’effet d’ancrage joue également un rôle lors de l’estimation de budgets, de délais pour les projets, ou même lors de l’évaluation des objectifs de performance. Si les premières estimations sont trop optimistes ou pessimistes, elles peuvent fausser la perception et la planification de toute une chaîne de décisions importantes.
Conseils pour limiter son impact :
Reconnaissez l’ancre : La première étape pour contrer l’effet d’ancrage est de reconnaître quand une ancre est posée. Soyez attentif lors des discussions ou des présentations d’informations initiales et questionnez-vous sur la pertinence de ces données comme base de vos décisions.
Générez vos propres estimations : Avant de vous engager dans des discussions ou des négociations où l’ancrage pourrait jouer un rôle, essayez de formuler vos propres estimations basées sur votre analyse ou votre expérience. Avoir un point de référence indépendant peut vous aider à rester objectif.
Utilisez une fourchette plutôt qu’un point fixe : Lorsque vous définissez des estimations pour des projets ou des négociations, pensez à utiliser des fourchettes de valeurs plutôt que des points fixes. Cela peut aider à atténuer l’impact de l’ancre initiale et à encourager une discussion plus ouverte sur les possibilités réelles.
Demandez des informations supplémentaires : Avant de prendre une décision basée sur une ancre, demandez et examinez des données supplémentaires. Cela peut inclure des comparaisons de marché, des analyses historiques ou des scénarios alternatifs qui mettent en contexte l’information initiale.
Conclusion
Certaines industries ont bien compris les biais cognitifs et les utilisent pour nous vendre des produits. Mais les comprendre et les reconnaître est essentiel pour toute personne cherchant à optimiser sa prise de décision en prenant des décisions éclairées et efficaces dans le monde du travail (et aussi personnelle !).